Ou
Un Spectacle avec un S majuscule (mais bon c’est vu et revu, dommage car c’est efficace)
Ou
Comment j’ai eu envie de virevolter dans les airs pendue à des rideaux sans fenêtres (et d’en faire mon activité principale)
Samedi
soir, je me suis rendue au Cirque Électrique à la Porte des Lilas. Presque les
yeux bandés, j’étais vierge de toutes informations concernant ce qui allait
m’être donné de voir, ou de vivre. J’en avais vaguement entendu parler un jour.
Quelqu’un m’avait dit « Tu devrais y aller, il y a de jolies
performances ». Mais le mot « cirque » me bloquait certainement
un peu. Et le mot « électrique » me faisait peut-être penser que je
devais connaître quelqu’un pour pénétrer cet univers. Bref, c’est ce qui s’est
passé ce week-end, on m’a littéralement pris par la main pour aller voir la
dernière du spectacle nommé « le Cabaret Électrique ».
Non
loin du métro, le Cirque se dresse, lumineux et imposant. Vous avec déjà dû
passer devant une dizaine de fois en prenant le périph' mais il faut avoir
l’intention d’y aller pour le remarquer. Comme un tour de magie.
Une
fois le rideau du chapiteau passé, je me retrouve dans une atmosphère bien
particulière, hors du temps, intimiste, éclectique, chaude et –son nom le porte
vraiment bien- électrique. Une trentaine de personnes est assise sur des petits
gradins, face à un orchestre encore décomposé. Au début, je ne sais pas
différencier tous les personnages. Je marche sur le parquet de la scène
circulaire et me demande si je suis en train d’interrompre quelque chose. Non,
ça n’a pas encore commencé. Les serveurs ou les musiciens ? Leur costume
trois-pièces blanc est similaire. Des rires éclatent, des gens courent et se
prennent les pieds dans les fils. Une corde remonte. Oui, c’est bien un cirque.
Il y a cependant une énergie bien différente, une étincelle dans les yeux de
chacun, des sourires entiers et des corps curieux. Nous prenons place à l’une
des petites tables installées sur les côtés. Nous verrons plus tard, lorsque
l’effeuilleuse s’effeuillera et lorsque le néo-clown fera accidentellement tomber
son pantalon, que nous ne sommes pas en position de visionnage optimale mais ce
n’est pas trop grave. Une bouteille de blanc est commandée mais nous ne savons
toujours pas si le spectacle a commencé. Je crois que oui maintenant, derrière
nous, le chant de Maria Fernande Ruette, une grande et intriguante Brésilienne,
se fait doucement ressentir, elle est éclairée par un halo rendant la scène complètement
désuète.
Après cette poétique introduction, le saltimbanque/chef
d’orchestre/animateur/néo-clown prend la parole maladroitement. Mais c’est une
maladresse bien maîtrisée. Comme sorti du lit, il annonce le premier numéro
presque en bafouillant et trébuchant. L’orchestre entame une mélodie froide
mais sensuelle au synthé accompagné de voix suaves. De ce début
merveilleusement chaotique s’est ensuivi une série de shows rocambolesques.
Dans la forme, ces numéros de cirque existent déjà, mais dans le fond, je n’ai
jamais vu un tel spectacle.
En vrac, j’ai été ébahie par un couple de
voltigeurs-acrobates tout plein d’assurance, de muscles et de délicatesse,
s’aimant l’un l’autre dans les airs et défiant toutes lois de la gravité ;
par une trapéziste vêtue d’un justaucorps laissant apparaître ses belles fesses
(pas jolies, belles !), pleine de grâce et de pêche, fusionnant avec son
étroite balançoire ; par une ravissante Eurasienne se roulant sur un tapis
de verre brisé tout en fumant nonchalamment sa cigarette, laissant la fumée de
cette dernière rencontrer les particules de talc encore présentes dans l’air,
saignant son art sans artifice et éveillant un certain instinct lesbien ;
par un petit homme robuste et souriant s’agrippant vivement à une barre de fer pour
réaliser des prouesses du type que tu sauras jamais faire avec tes petits
bras ; par une prestation de pole-dance tout sauf vulgaire par la moitié
du couple acrobate, admirablement
élégante-mais-quand-même-t’as-pas-envie-de-rigoler-avec-elle ; par les
interludes de poèmes délicatement récités par notre chanteuse rétro ; par
un numéro de diabolo (oui, le diabolo, en fait c’est pas du tout pourri)
impressionnant avec un énième tour raté quatre fois d’affilée, encouragé sans
failles par le public –j’ai presque tiré une larme ; par (et j’ai quasiment envie de dire, surtout) les musiciens, T’n’T, qui ont continuellement
accompagné les numéros avec des compositions originales géniales ; par un
certain Kiki Picasso, qui a volé le micro au néo-clown durant 7 minutes pour
présenter un robot américain surréaliste joué par deux paires de jambes et une
grande boite en carton peinte ; par la trapéziste revenue voltiger
quelques instants en nous montrant qu’elle connaissait mieux son centre de
gravité que moi mon code de carte bancaire ; par le power couple revenu
jouer avec un grand drap blanc suspendu dans les airs, faisant mine de se
laisser tomber chaque instant, rendant nos mains moites et nos cœurs chauds et
même par ce numéro de peinture fluo sur corps nu devant néon chancelant, joué
par l’érotique effeuilleuse très sérieuse.
Lorsque
cet enchaînement magique s’est terminé et que la totalité de l’équipe a été
présentée, je n’avais qu’une seule envie : en faire partie.
Moi
aussi je veux un justaucorps et du talc maintenant !
Je
suis vraiment heureuse d‘avoir vécu ce vrai spectacle. Désolée pour vous mais c’était
la dernière représentation. En revanche, la programmation de qualité continue
au Cirque Électrique (plus d’infos ici) et je vous encourage vivement à aller y prendre votre dose d’émotions artistiques.
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